Session 102 : quatre projets d’animation, des animaux, des OVNIS… et le retour des frères

  • 17.12.2020

Pour la plupart d’entre nous, 2020 a été une des années les plus bizarres et perturbantes depuis notre naissance. Une année où toute l’industrie audiovisuelle a été chahutée sur ses bases, comme la plupart des autres domaines artistiques et économiques. Au cœur de ce déluge, Wallimage a tenté d’épauler les producteurs, techniciens et prestataires wallons du mieux possible. Il y a bien sûr eu moins de dossiers déposés , à nos différentes sessions, mais les perspectives développées par ces projets pour l’audiovisuel régional sont néanmoins enthousiasmantes.

 

Pour cette ultime session de 2020, le conseil d’administration, réuni pour la première fois sans Yves Vander Cruysen tragiquement disparu le mois dernier, a décidé de cofinancer sept initiatives. Sans surprise, c’est encore une fois l’animation qui domine les débats avec trois projets classiques et une pépite qui sort clairement des sentiers battus.

 

Momolu est un panda doux qui a le talent de trébucher dans des situations inattendues. Ses amis tentent de résoudre leurs problèmes quotidiens par la pensée créative et la collaboration. Série d’animation qui comptera 78 épisodes de 7 minutes en 2d, Momolu and friends nous est présenté par Digital Graphics qui, ces derniers mois, a réussi à capter deux fois notre soutien.

La société d’Alleur nous propose ici un partenariat quadripartite Avec l’Allemagne comme d’habitude, mais aussi avec le Canada et la Finlande, plus précisément les créateurs d’Angry Birds ! Le point fort du projet est de permettre le développement de compétences 2D jusqu’ici non encore déployées en interne. Du coup, la fabrication de cette série représente une réelle opportunité de lier formation (en partenariat avec Technifutur) et offres d’emploi rapides sur du long terme (1 an) pour de jeunes profils d’artistes 2D. 99 % des dépenses belges sont wallonnes. Un pourcentage d’autant plus remarquable que pour la réalisation de ce projet 7330 jours/hommes seront nécessaires. Treize chefs de postes seront engagés, pour un total de 46 collaborateurs wallons.

 

Série d’animation pour les 6-12 ans, Tobie Lolness sera adapté dans un format inhabituel pour l’animation, à savoir treize épisodes de 52 minutes. La série très captivante est basée sur un récit épique paru chez Gallimard Jeunesse en 2006. Il a remporté 28 prix de lecteurs (!) et s’est vendu à près de 500 000 exemplaires en France et un million dans le monde. Il a aussi été traduit dans plus de 30 langues. On y suivra Tobie et ses proches qui résident… dans un chêne, ruche de vie. Ses habitants mesurent quelques millimètres, mais vivent en parfaite harmonie avec leur habitat. Le père de Tobie, grand savant, refuse de révéler sa dernière découverte scientifique, car elle pourrait bouleverser le fragile équilibre de leur environnement, n’en déplaise à certains membres cupides du Grand Conseil… Cette bravade va entraîner la famille de Tobie dans la déchéance. Emprisonné, le jeune héros va se retrouver propulsé seul dans de terribles aventures.

Grâce à Umedia qui localise une partie de la fabrication en Wallonie, 950 000 euros vont être dépensés chez Waooh ! pour 700 décors ce qui représente 3,350 jours/homme (soit 13 équivalents temps plein pendant 14 mois). Le studio sera occupé sur ce projet pendant 260 jours.

 

 

Waooh ! va également travailler sur Tortel, une série d’animation de 22X26 minutes, coproduite par Belga qui accompagne les Allemands de Caligari pour une troisième série consécutive après Coconut (cofinancée par Wallimage) et Muscleteers pour laquelle nous n’avons pas été sollicités. 99.34% des dépenses belges seront wallonnes avec, outre 8 mois de storyboarding chez Waooh !, l’élaboration du design des personnages et du background dans un studio wallon, soit minimum 3 ou 4 mois de boulot. Le sound design, le mix et le mastering seront aussi wallons, comme la musique confiée au désormais incontournable Montois, Michel Duprez, sous la houlette de Rabada.

 

Les séries d’animation, tout le monde connaît, mais les expériences qui mêlent animation et réalité virtuelle dans un emballage gaming, c’est beaucoup plus inattendu. Les Anversois de Stacka nous ont pourtant présenté The Werewolf Expérience, une aventure de neuf minutes, où vous allez incarner (oui, littéralement incarner !) un loup-garou. Pour mettre fin à votre règne de terreur, vous devrez chasser le cerf blanc sacré, censé guérir toutes les maladies. Mais….
Cette production innovante, 100 % belge est déjà soutenue par le VAF. Elle sera néanmoins en partie fabriquée en Wallonie où Stacka va ouvrir un studio spécialisé dans la VR. Au-delà de cette excellente nouvelle, on peut aussi annoncer que la spatialisation du son (capitale ici) sera mise au point chez Cosounders au Pôle Image de Liège.

L’objectif de ce projet est de séduire des festivals de la trempe de Sundance, Venise ou SXSW. Mais, comme le design ne mise pas sur le réalisme, il existe un vrai potentiel économique de longue traine. Il s’agit donc d’un produit idéal pour la diffusion dans des salles d’arcade VR ou des plateformes VR comme Inception VR ou Steam VR. L’avenir ? On va suivre ça de près.

 

Au-delà de l’animation omniprésente, cette ultime session de 2020 nous aura aussi permis d’ajouter à notre line-up un documentaire, une série et un long métrage. Tous des projets très attendus dans leur créneau respectif.

 

Wallonie Sauvage : Invasions est la suite de Wallonie Sauvage, que nous avons soutenu l’an dernier et qui a connu une petite carrière très sympathique : RTL l’a récemment acquis pour en faire une émission diffusée en prime time suivie par 320 000 téléspectateurs. Costaud ! Robert Henno et Jean-Christophe Grignard, les deux réalisateurs qui ont concocté et produit ce premier numéro, se sont cette fois associés à Taka (Hugo Deghilage) qui prend en charge la production administrative du projet et participe ainsi à la professionnalisation de la structure. C’était une de nos demandes pour poursuivre l’aventure aux côtés de ses talentueux pionniers du film animalier. Côté fabrication, on retrouvera exactement la même équipe aux mêmes postes pour une exploration des espèces invasives considérées comme des menaces importantes de la faune et la flore locale indigène et qui peuvent influer sur les écosystèmes et la biodiversité. Sortant du cadre classique de nos interventions, Wallonie Sauvage nous permet de soutenir une structure nouvelle, 100 % wallonne, et de l’aider à se professionnaliser. Une mission comme on les aime.

 

Très fier de la formidable première saison d’OVNI qui sera diffusée sur Canal Plus dès le 11 janvier (mais que nous avons déjà eu la grande chance de visionner), Be Films prolonge son partenariat avec les Français de Montebello et nous a proposé une deuxième saison dont la structure de production est calquée sur la première. 48 jours de tournage en Wallonie, de grosses dépenses en techniciens et en acteurs, de la location (chez TSF) et plus de 400 000 euros de dépenses effectuées chez les magiciens de Benuts pour la réalisation des effets spéciaux. Cette série de science-fiction décalée qui nous plonge dans la fin des années 70 avec tous les délires esthétiques qui caractérisent ces années-là est toujours mise en scène par Antony Cordier (Happy Few) pour douze nouveaux épisodes d’environ 35 minutes. Un régal absolu.

 

Tous ces projets retenus sont très excitants, mais le seul long métrage de la session que le CA a décidé de cofinancer sera clairement un des fleurons de Wallimage lors des prochaines années : Tori et Lokita est le nouveau film de Jean-Pierre et Luc Dardenne, produit par les Films du Fleuve évidemment. Nous ne dirons rien du formidable scénario qu’ils vont mettre en images, excepté qu’il est très efficace et, hélas, d’une tragique actualité. Toute l’équipe l’a adoré. Mais ce n’est évidemment pas l’essentiel pour un fonds économique. Pour nous, le principal est que les frères tourneront à nouveau durant dix semaines en région liégeoise avec une équipe de 38 personnes. L’objectif est bien sûr de renouer avec un succès international, porté par une participation (on croise les doigts) au Festival de Cannes 2022. L’essentiel du casting sera composé d’acteurs peu connus, voire carrément débutants, et on se réjouit d’avance de rencontrer ces nouveaux talents guidés par des réalisateurs qui nous ont offert tout au long de leur carrière des découvertes exceptionnelles comme Emilie Dequenne, Jérémie Renier, Déborah François ou Thomas Doret pour ne citer que quelques très jeunes acteurs, révélés par les frères, et qui continuent à apparaître régulièrement sur les écrans.

 

L’année 2020 se termine ainsi pour Wallimage sur une session emballante qui nous aura permis d’investir près d’un 1.3 millions d’euros sur des projets excitants qui correspondent en tout point à nos différentes missions et aux standards auxquels nous aspirons. Sept occasions de soutenir et de développer des pans entiers de notre industrie wallonne qui en a plus que jamais besoin.

 

(photo d’ouverture Christine Plenus/Les films du fleuve)