115e session

10 nouvelles œuvres rejoignent le line-up de Wallimage qui investit 1,2M€

Deux longs métrages initiés en Belgique, trois coproductions classées « arthouse », venues de France, mais aussi d’Espagne et d’Italie, une série policière, deux films français très grand public et deux animations on ne peut plus différentes : les projets choisis par le Conseil décentralisé des coproductions de Wallimage sont particulièrement hétéroclites… mais composent une sélection très homogène.

 

  • 01.08.2023

Pour soutenir ces projets, le fonds wallon investira 1.23M€ pour des dépenses en région évaluées à plus de 8.99M€. Soit un ratio de réinvestissement record de 731%.

Le point commun de tous ces projets ? Ils vont permettre à de nombreux techniciens wallons et à des prestataires établis dans notre région d’œuvrer dans d’excellentes conditions sur des projets de tous types qui mettront leur talent en lumière à l’international. Cerise sur le gâteau : un nouveau studio d’animation liégeois va pouvoir se lancer dans une mission d’envergure qui lui assure du travail jusqu’en juin 2025.

Les dix projets retenus sont :

  • Cap Farewell (Iota Production) — drame initié en Fédération Wallonie-Bruxelles — 170K€
  • De l’art ou du Machond ? (Artemis Productions) — comédie initiée en Fédération Wallonie-Bruxelles — pour 50K€
  • Les reines du drame (Wrong Men North) — comédie dramatique – 80K€
  • Samia (Tarantula Belgique) — drame — 80K€
  • L’Abbesse (Saga Film) — drame — 75K€
  • Serial Hunter (Be-Films) –série policière – 100K€
  • Ducobu se met au vert (Umedia Production) — comédie familiale — 100K€
  • Moon le panda (Umedia Production) – long métrage familial d’aventures exotiques écologiques – 125K€
  • Cystem failure (Beside Productions)–animation – 400K€
  • Silex and the city (Left Field Ventures) – animation – 50K€

Si Wallimage est aujourd’hui, et de loin, le premier fonds national pour les coproductions internationales, le nombre d’œuvres belges présentées au fonds est plutôt en baisse. En cause : la nature souvent très bruxelloise des projets initiés en Fédération Wallonie-Bruxelles. C’est donc avec satisfaction que nous accueillons deux nouveaux titres dans cette catégorie.

  • Cap Farewell

Cap Farewell est le 3e long métrage de Vanja d’Alcantara (Beyond the steppes, Le cœur régulier). Il se concentre sur le personnage de Toni (Daphné Patakia), qui, à 24 ans, sort tout juste de prison, heureuse de retrouver sa petite fille Anna. Mais résistera-t-elle à son attirance pour Max (Matteo Simoni), son amour de jeunesse, celui à cause de qui elle a été privée de liberté ? Iota Production qui développe ce projet a prévu un tournage réparti entre la Wallonie (près de 3 semaines), la Flandre et les Pays-Bas. L’équipe wallonne comptera notamment le chef déco, la chef maquilleuse, le green manager, les assistants-réalisateurs et l’équipe de production. Les autres dépenses comprennent la location de machinerie (KGS) et de caméra (Eye-Lite), les loges, des décors ainsi que la cantine. Par nécessité de réciprocité, la postproduction sera canadienne.

  • De l’art ou du Machond ?

Dans un registre très différent, celui de la comédie loufoque, doublée d’une réflexion iconoclaste sur l’art, Stefan Liberski (Bunker paradise, Baby balloon, Tokyo fiancée…) va adapter pour le grand écran le roman La dilution de l’artiste de Jean-Philippe Delhomme : Yves Machond quitte sa petite maison de Boitsfort pour s’installer à Etretat, terre de l’impressionnisme. Il espère y trouver l’inspiration qui lui permettra d’enfin créer l’œuvre majeure qui le mènera à la postérité. Il va surtout croiser une directrice de galerie excentrique dont il tombera amoureux. De l’art ou du Machond ?, produit par Artemis Productions, réunira Benoit Poelvoorde, Camille Cottin, Gustave Kervern, François Damiens et Laurence Bibot, soit ce qu’on peut appeler un casting prometteur. Le tournage sera essentiellement français avec six techniciens wallons. Seront aussi de la partie Manu Cuisine aux fourneaux, Level9 pour les SFX sur le plateau et Benuts pour les effets spéciaux numériques.

Les coproductions internationales peuvent être de plusieurs ordres : comédies très grand public, films d’auteur, série, animation ou live… Cette 115e session nous a permis de composer un cocktail assez explosif qui embrasse toutes ces spécificités.

  • L’Abbesse

Proposé par Saga Film, L’Abbesse est un film espagnol, historique et féministe, qui sera réalisé par Antonio Chavarrías. On y suivra Emma qui, après la mort du comte Wilfred lors d’une bataille contre des soldats musulmans, est nommée abbesse d’un couvent frontalier dans une région dévastée par la famine et la guerre. Les hommes pensaient l’envoyer dans un endroit perdu. Elle va marquer son époque. Si le tournage est entièrement localisé en Espagne, 3 techniciens wallons y participent. C’est au niveau de la postproduction que le dossier nous a surtout séduits avec une bande originale composée par Yvan Georgiev, résidant de Malonne, et une conjonction de studios wallons (Bardaf, Mute&Solo et Studio L’Equipe Wallonie) pour traiter l’image et le son. Sans oublier Benuts pour les indispensables effets spéciaux numériques.

  • Les reines du drame

Chaque projet ici retenu possède une tonalité spécifique. Les reines du drame, premier long d’Alexis Langlois, devrait désarçonner le spectateur entré dans la salle par inadvertance. Surtout s’il est allergique à l’humour caustique et à l’univers LGBTQIA+. Tous les autres se régaleront en suivant la carrière de Mimi Madamour, de son triomphe en 2005 dans un concours type « The Voice » à sa descente aux enfers, précipitée par une histoire d’amour chaotique avec la punkette Billie Kolher. Ce drame hystérique sera conté par le surprenant Youtubeur Steevyshady qui connaîtra les affres de la fascination non réciproque et du désarroi. Jubilatoire ! Ce « petit » dossier, composé par Wrong Men North s’articule sur des dépenses très structurantes. Si, en l’absence d’un grand studio wallon, le film est essentiellement tourné en région bruxelloise, 3 techniciens wallons y participent. La postproduction son se fera chez Bardaf, Cob Studios et Rene Records. Il y aura aussi de la postproduction image, des VFX chez Benuts, une cantine et de la location de matériel chez Eye-Lite. L’objectif est clairement cannois et on verrait bien ce brûlot programmé à la Semaine de la Critique, un espace très innovant depuis qu’il a été pris en main par Ava Cahen. On croise les doigts !

  • Samia

Yasemin Samderelli est une cinéaste italienne d’origine turque vivant en Allemagne. Son premier long-métrage Almanya, willkommen in Deutchland a cumulé 1.5 million d’entrées en Allemagne et une vente Amazone Prime. Elle récidive ici avec un des scénarios les plus passionnants, documentés et pertinents que nous ayons lus depuis longtemps. Samia est une jeune fille douée pour la course que le comité olympique somalien décide d’envoyer aux J.O. de Pékin en 2012. Sa contre-performance suscitera une vague internationale de sympathie, mais les fondamentalistes islamiques au pouvoir dans son pays ne l’entendent pas de cette oreille. Une fiction ? Hélas non. Samia est une histoire vraie, bouleversante et exemplaire, qui démontre qu’on ne devient pas migrant par plaisir, que le malheur s’abat sur tout le monde, peu importe sa volonté et son courage, et que cette tragédie doit être gérée avec humanité et un indispensable sens des responsabilités. Le tournage est prévu au Kenya et en Italie. Grâce à Tarantula Belgique, le cheval de Troie wallon en Italie, une équipe d’ici est d’ores et déjà confirmée sur place avec Florian Berutti comme directeur de la photographie, son équipe wallonne et l’ingénieure du son Céline Bodson tandis que Benuts s’occupera des nombreux effets spéciaux numériques.

  • Serial Hunter

Alors que le format semble s’imposer à travers le monde comme la manière la plus prisée de raconter des histoires en images, la série disparaît peu à peu des propositions faites à Wallimage au profit d’un retour en force du long métrage. Le seul représentant de cette tendance à cette session est Serial Hunter, un thriller articulé sur 4 épisodes de 50 minutes, avec Eric Cantona et Thiphaine Daviot en tête d’affiche. Le premier incarne un ancien profiler star tombé en disgrâce qui se retrouve à traquer le même tueur qu’une jeune inspectrice de la crim’ dont le caractère trop franc agace tous ceux qui l’approchent. Le tournage est 100 % belge avec 12 jours en Wallonie sous la houlette de Be-Films et 10 techniciens régionaux en plus de 7 comédiens dans des rôles secondaires, des décors, des effets spéciaux sur le plateau, de la location de camions, d’électro et de machinerie chez TSF, une cantine de Châtelet, mais également la gestion des rushes et le montage son chez Studio l’Équipe Wallonie, le bruitage et un peu de VFX réalisés par… Benuts.

  • Ducobu se met au vert

Serial Hunter nous conduit en douceur vers les projets grand public, qu’incarne à la perfection le 5e volet des aventures de Ducobu, le 3e mis en scène et co-écrit par Elie Semoun. Si les jeunes acteurs changent à chaque fois, le succès est constant avec toujours plus d’un million de spectateurs en France pour les quatre premiers épisodes, mais aussi plus de 40 millions de téléspectateurs cumulés pour les trois premiers films lors des diffusions sur le petit écran. Du délire… et des recettes substantielles pour Wallimage grâce aux négociations menées par Umedia Production auprès de ses partenaires français. Le thème de ce nouvel opus est en plein dans l’actualité : Léonie Gratin se met en effet en tête de sensibiliser Ducobu à l’écologie domestique. En vain. Le tri des poubelles ? Pfff. Manger moins de viande ? No way! Mais quand il découvre que Greta Thunberg a pris une année sabbatique pour défendre sa cause, le voilà qui monte au créneau pour déclencher une grève climatique. De quoi augmenter encore la Ducobu mania qui frappe les jeunes générations. 17 jours de tournage sur 46 de ce Ducobu se met au vert seront localisés en Wallonie avec 13 techniciens régionaux dont l’indéboulonnable Pascal Jasmes et l’équipe de construction. Il y aura aussi de la location chez Macadamcar, KGS, une cantine organisée par Auguste Traiteur, la gestion des rushes par Studio l’Equipe Wallonie, le montage son chez Bardaf, le bruitage chez Cob Studios et des effets spéciaux pour le studio UFX Wallonie sous la nouvelle direction de Gaël Durant (ex-Mikros Liège).

  • Moon le panda

Si Ducobu est un format connu, Moon le panda est une aventure plus exotique puisque Gilles de Maistre (Mia et le lion blanc, Le loup et le lion…) nous emmène en Chine où le jeune Tian, parti se ressourcer avec sa mère (Alexandra Lamy) chez sa grand-mère paternelle au cœur de la réserve naturelle de Sichuan, va découvrir un bébé Panda. L’histoire d’amitié entre le garçon et l’animal (les premières images sont saisissantes) va se développer au fil des ans et donner un nouveau sens à la vie de Tian. Avec un tournage entièrement localisé hors de France, la production n’a pas accès au crédit d’impôt national. Gaumont, convaincu par ses expériences précédentes, a donc suggéré à son partenaire Mai-Juin, une collaboration priorisant la Wallonie menée par Umedia Production. Résultat : trois Wallon(ne)s sont sur le plateau en Chine et toute la postproduction de ce futur blockbuster sera wallonne avec 12 techniciens au studio l’Equipe Wallonie qui vient d’être remis à neuf. 70 % des VFX seront effectués chez UFX Wallonie avec 9 opérateurs wallons dans les bureaux de Genval. Des dépenses constructives, une demande très mesurée et une proposition de remontées de recettes attrayante sur un film prometteur, voilà le tiercé gagnant qui conduit aisément ce Panda jusqu’en Wallonie.

  • Cystem failure

Une session de Wallimage sans animation en 2023 est-elle encore envisageable ? Cystem failure, projet norvégien de Martin Lund, sera largement réalisé en Wallonie grâce à Beside Productions qui a localisé chez nous près de 4 millions d’investissements ! Le travail, qui concerne toutes les étapes de fabrication, durera 335 jours ouvrables, au studio Movida, antenne wallonne de Nwave opérant ici de façon autonome sous la houlette de Thierry Tirtiaux (ex-Digital Graphics). 56 personnes (38 équivalents temps plein) œuvreront sur ce formidable projet qui suit Kaja, une jeune… cellule qui vit dans le corps d’un garçon de 10 ans. Kaja souffre de ne pas pouvoir se diviser comme les autres et se sent rejetée. Elle veut alors muter pour devenir la cellule cancéreuse qu’elle est par essence. Jusqu’à prendre conscience de sa nature destructrice et reconsidérer sa position. Si le graphisme est attrayant, le sujet est grave et passionnant, ludique par la forme, instructif sur le fond. Trois ans de patience seront évidemment nécessaires pour découvrir le résultat sur grand écran.

  • Silex and the city

Tous les projets d’animation ne sont pas des mastodontes destinés à dévorer à eux seuls le budget de Wallimage. Pour preuve Silex and the city, long métrage adapté des capsules diffusées sur Arte (5 saisons, 180 épisodes) et des BD à succès (9 volumes chez Dargaud, un million d’exemplaires vendus). C’est le père de la série, le drolatique Jul qui va le réaliser avec Jean-Paul Guigue sous la houlette de Left Field Ventures qui prend en charge la coproduction belge. Au rythme d’une vanne par ligne sur une trame aussi jouissive qu’improbable, le scénario nous a fait hurler de rire : venant d’une préhistoire d’opérette où tout semble figé à jamais, un père et une fille en conflit sont propulsés dans le futur. Ils en ramènent accidentellement… une « clef coudée » Ikea qui va déclencher toute sorte d’évolutions cataclysmiques. Comme si ce pitch délirant ne suffisait pas, la production s’est assuré un casting vocal hallucinant : François Hollande, Julie Gayet, Amélie Nothomb, Alex Vizorek, Bruno Solo, Guillaume Gallienne, Frédéric Beigbeder, Léa Salamé, Léa Drucker, Denis Ménochet, Frédéric Pierrot, Michel Vuillermoz ou Stéphane Bern. Les studios Waooh! à Liège s’occuperont du layout et de l’animation (46 minutes) pendant 17 semaines. Le budget est serré, car le graphisme sobre et une animation dépouillée le permettent. Les dépenses le sont aussi, mais une demande plus que raisonnable et une proposition de remontées de recettes croustillante ont emporté notre adhésion.

La sélection de ces dix titres est le résultat d’une intense analyse basée sur des critères économiques et écologiques, puisque cet aspect est aujourd’hui bien implémenté dans notre évaluation. Un choix drastique, car 22 projets nous ont été soumis. Au regard de l’enveloppe disponible, seulement 45 % des dossiers ont pu être retenus, le taux le plus bas de l’histoire de Wallimage.

Ce pourcentage assez cruel est la conséquence d’un accroissement patent de l’activité des producteurs belges, mais aussi d’une attractivité wallonne de plus en plus évidente. Au-delà de la force de frappe de Wallimage, elle repose sur des techniciens aguerris (qui ne sont pas en nombre suffisant, qu’on se le dise) et des prestataires dont la réputation a largement franchi nos frontières, que ce soit en postproduction son, image, en animation ou dans le domaine pointu des VFX.

Le dépôt limite pour la prochaine session est programmé le 7 septembre. Les vidéo-discussions préalables avec les producteurs qui le désirent débuteront le 28 août.