Universel et… universellement apprécié.

  • 24.05.2011

« Si les frères racontent une histoire dure, ils signent aussi un film qui tend vers la lumière, l’espoir, l’apaisement, la reconstruction », écrit Jérôme Colin dans Moustique . … Ils nous montrent que seul l’humain peut sauver l’humain. Qu’il faut se battre (si possible à plusieurs) pour repousser la souffrance, pour apprendre à lâcher prise avec le passé. Pour oser regarder droit devant. Et cela, les frères Dardenne l’expliquent finalement sans lourdeur ni pathos. Dans un film à la réalisation limpide, claire, simple. Assurée. Qui laisse aux acteurs de larges espaces pour s’exprimer (le face-à-face entre le gamin et son père dans les cuisines d’un restaurant est splendide). Un beau film de cinéma. Sans tralala. »

« Plus sereins les gars de Seraing ? », surenchérit Fabienne Bradfer dans Le Soir . « Totalement, même si leur film inscrit dans ici et maintenant contient toujours les fondamentaux d’un cinéma dur et frontal et poursuit sans esbroufe le constat violent du monde dans lequel on vit. Mais on peut parler de changement dans la continuité. Avec du soleil dans tous les plans, une actrice connue en guise de bonne fée et de la musique ici et là. Le tout d’une maîtrise sans faille. »

La lumière, il en est beaucoup question dans les articles consacrés au film. Dans Le Focus Vif, Louis Danvers avoue qu’il a été touché par le Gamin qu’il encense sans retenue ni fausse pudeur : « Âpre et déchirant comme le manque d’amour; tendre au cœur comme une promesse d’avenir, captivant comme un thriller à suspense et bouleversant comme ces films néoréalistes italiens centrés sur l’enfance, Le Gamin au Vélo poursuit sur un mode lumineux l’œuvre profondément humaniste des Dardenne. »

Il n’y a pas qu’en Belgique, que les journalistes se laissent aller au plaisir de l’émotion brute. Dans Le Monde (accessible aux seuls abonnés), Jean-Luc Doulin parle lui aussi de thriller  » Explorant l’âme en grattant l’os, ils orchestrent un thriller sentimental, et leur étude morale est digne d’Emmanuel Levinas. Le suspense sentimental est entretenu dans la certitude que « l’éthique est une optique ». Le gamin au vélo est cet « enfant pâle » dont parlait le poète Henri Michaux. L’enfant abjuré, tombé de haut, en coma affectif, au bord de la disparition. Du grand art. »

Sidt Sakho, journaliste à Chronicart partage cet enthousiasme et s’arrête plus particulièrement sur le jeu des acteurs : »Bien que le Gamin soit et reste le point d’ancrage de toutes les scènes, que rien ne s’engage dans le film hors de sa présence et son rapport prioritaire à chaque situation, Cécile de France brille ici comme nulle part ailleurs dans son rôle de mère d’élection, par un mélange de vraie discrétion et de grande disponibilité, une présence neutre la rendant tout de suite crédible, indispensable. C’est aussi l’une des forces des Dardenne que de savoir opposer à l’obstination butée d’un personnage principal la problématique de l’égale importance d’au moins un autre, contrer le solipsisme de Rosetta ou Cyril par l’attention à la fois bienveillante et résistante de Riquet ou Samantha. Rien que pour cela – mais tout aussi bien la belle tenue d’une mise en scène « à même l’énergie » -, Le Gamin au vélo est d’emblée l’une des œuvres les plus franches et incarnées de cette année. »

Les personnages et les acteurs qui les interprètent, c’est également ce qui a particulièrement frappé Fernand Denis dans La Libre : « Si Cécile de France est « dardennisée » dans le rôle, elle irradie leur cinéma d’une lumière nouvelle. Thomas Doret, lui, est une révélation de plus. »

La jeune trouvaille des frères Dardenne est d’ailleurs encensée dans toutes les critiques, sans exception. « .. L’impressionnant Thomas Doret se rajoute à la longue liste des jeunes talents révélés par le duo. Le cinéma des Dardenne a ceci de vivant qu’il ne se repose pas sur ses lauriers, mais ose, sur un terreau de départ semblable, se confronter à des obstacles nouveaux. » écrit Thierry Chèze dans Studio Ciné Live

Unanime, l’accueil critique réservé au Gamin au Vélo souligne à quel point, à partir d’un cinéma très personnel, sans concessions, ni emphase ni pathos, Jean-Pierre et Luc Dardenne sont parvenus à rendre leurs films universels. Que cette nouvelle œuvre soit si intimement sérésienne n’est en rien un obstacle : sans racines, sans identité, personne ne peut aspirer à l’universalité.