La 107e session de Wallimage est historique puisqu’arbitrée par un tout nouveau conseil décentralisé qui se consacrera à nos investissements en termes de coproduction pendant les cinq prochaines années. Ce conseil est une émanation du conseil d’administration mis en place en décembre et présidé par Richard Miller, un CA dont vous trouverez tous les détails ici.
Cet ultime dépôt de 2021 est également à marquer d’une pierre blanche par la quantité et la qualité des dossiers qui nous ont été soumis. Dès le début de l’analyse, nous savions que les choix seraient difficiles, mais que les projets retenus seraient aussi exceptionnellement intéressants pour la région wallonne.
Au final, cette session constitue un nouveau record avec douze œuvres audiovisuelles cofinancées pour un total de 1 760 000 euros investis et des dépenses consenties en Wallonie qui dépasseront les 9,5 millions d’euros : une aubaine pour nos techniciens et notre industrie d’animation et de postproduction.
FILMS DE GENRE
Une des tendances de cette collection de fin d’année est le retour en force des longs métrages. Autre particularité : trois d’entre eux sont menés par des maisons de production belges alors qu’ils possèdent un caractère international très marqué et seront réalisés par des artistes étrangers.
Ce sera le cas pour The Pod Generation, une production de science-fiction qui évoque Gattaca ou Her dans son ambition de confronter l’humain à une technologie qui peut rapidement devenir (très) envahissante. Scope Pictures produira ce long métrage mis en scène par Sophie Barthes qui réunit un casting anglo-saxon plus que séduisant : Emilia Clarke (Game of thrones) y côtoiera Chiwetel Ejofor (12 years a slave) et Neve Campbell (Sex crimes, Scream). L’intégralité du tournage sera belge avec une armada de techniciens wallons plongés dans des défis impressionnants. Outre la location de matériel et la cantine, tous les effets spéciaux se feront chez Mikros pour 650 000 euros tandis que la postproduction image et son se partagera entre Genval-les-Dames, très majoritaire sur ce projet, et l’Équipe Wallonie. Un fleuron supplémentaire à épingler à notre catalogue de films de genre que cette session va enrichir dans des proportions inédites.
Avec La Saveur de la Mort, Fontana, son producteur délégué, nous propose un thriller fantastique angoissant réalisé par Jean-Luc Herbulot et emmené par Didier Morville (alias JoeyStarr), Asia Argento et Riccardo Scamarcio. Du lourd ! Le scénario qui se déroulait à la base aux États-Unis a été (magistralement) adapté à l’Europe et ce road movie diabolique s’étend désormais de Bruxelles à Marseille. Vingt des trente jours seront filmés dans la campagne wallonne avec une équipe technique impressionnante. La saveur de la mort est déjà entre les mains des magiciens de XYZ pour les ventes internationales : un signe qui ne trompe pas.
Le Tombeau des Géants est le premier long métrage du luxembourgeois Loïc Tanson, coproduit en Belgique par Artémis. Cet « Alpenwestern » se déroule au milieu du XIXe siècle dans un Luxembourg en train de se transformer en état moderne. Violée alors qu’elle devient tout juste adolescente, l’héroïne échappe de peu à la mort après avoir vu ses parents se faire tuer par le cruel seigneur local. Lorsqu’elle revient au village, métamorphosée par un séjour parmi les Amérindiens, elle ne rêve que de vengeance. Le film sera tourné dans un luxembourgeois d’époque, entièrement en Wallonie, près de La Calamine. Il réunira une équipe wallonne de 28 personnes, dont 4 chefs de poste. Outre la location des caméras et de l’éclairage chez Eye-lite et de la machinerie chez KGS, le catering sera pris en charge par Mille et une saveurs. La majeure partie de la postproduction sera luxembourgeoise, mais les VFX seront belges, comme les SFX exécutés sur le plateau par Lionel Lé et les Carolos de Level 9.
Film de genre encore et toujours, film historique aussi, mais le drame se déroule cette fois dans les mers glacées du Nord de l’Europe. Nous sommes à la fin du 19e siècle dans un petit village de pêcheurs islandais où l’angoisse s’installe. La famine menace et les habitants, effrayés de devoir partager leurs maigres pitances, refusent de venir en aide à un bateau qui fait naufrage à proximité des côtes. Des événements surnaturels commencent alors à secouer les autochtones qui disparaissent les uns après les autres. Coproduit en Belgique par Wrong Men avec les Irlandais de Brightside Pictures limited, The Damned est écrit par Jamie Hannigan déjà auteur de Pilgrimage et de la prometteuse série Testament en développement chez Wallimpact. Le tournage sera irlandais, mais l’équipe son sera wallonne ainsi qu’une partie des techniciens pour les prises de vues sous-marines aux studios Lites à Vilvoorde. Hors montage images, l’entièreté de la postproduction sera wallonne, et les VFX seront réalisés par MPC Film & Episodic (ex-Mikros) pour plus d’un demi-million d’euros.
VOYAGES VOYAGES
Lites accueillera aussi Apnea que nous a proposé Versus, son producteur délégué. Dirigé par David Rosenthal, Apnea, est un drame romantique qui se déroule dans le milieu des compétitions d’apnée. Camille Rowe (qui incarnait déjà une plongeuse dans The deep house) et Sofiane Zermani (Les sauvages) en sont les interprètes principaux. Bardaf pour la postproduction son, Benuts pour les effets spéciaux ; Genval-les-Dames pour le bruitage, et TSF Wallonie, pour la location de caméras et d’éclairage, participeront à cette aventure estampillée Netflix comme La femme la plus assassinée du monde et La terre et le sang que nous avons cofinancés dans le passé.
De l’Islande à la Guadeloupe, du Luxembourg à la Côte d’Azur, cette session nous fait voyager comme jamais. Elle nous emmène aussi en Écosse où un groupe de banquiers allemands en team building dans un manoir délabré va rencontrer un Lord, une Lady et leur personnel étrange, une coach dépassée, une cuisinière trop ambitieuse… et un paon complètement dingue. The Peacock est la première coproduction mise en place entre les Liégeois de Frakas et les Allemands de MMC Movies Koln, la société de production attachée aux impressionnants studios de Cologne. Même s’il est censé se dérouler au Royaume-Uni, The Peacock sera filmé en Allemagne et… dans un château wallon (7 jours). Une team de 12 régionaux sera à l’œuvre et près de deux cent mille euros seront investis chez Bardaf en postproduction. Cerise sur le gâteau, TSF Wallonie fournira le matériel qui équipera le studio. Une très intéressante opportunité pour l’équipe de Laurent Simon.
Par le passé, Wallimage a déjà cofinancé deux longs métrages de Susanna Nicchiarelli : Nico 1988 et Miss Marx. La réalisatrice italienne clôturera cette trilogie féministe avec Chiara, l’histoire d’une jeune chrétienne qui quitte sa famille pour rejoindre François d’Assises et créer, contre l’avis des autorités religieuses très patriarcales, l’ordre des pauvres femmes, connues aujourd’hui sous le nom de Clarisses. Comme sur les précédents longs métrages de la cinéaste qui peut toujours compter sur Tarantula pour l’épauler au niveau belge, la filière son sera wallonne. On ne change pas une équipe récompensée d’un prestigieux Donatello du cinéma italien pour son travail sur Nico 88. Ostie sur le gâteau, les VFX seront conçus à Liège chez MPC.
Les films destinés aux enfants ne sont pas très courants en Belgique, mais en Allemagne ils s’inscrivent dans une tradition très prisée. Il y a quelques années, Wallimage avait cofinancé le long métrage Liliane Susewind qui après une belle carrière en salles de l’autre côté de la frontière a été diffusé chez nous sur Ouftivi. Le même producteur belge, Velvet Films, nous amène Les Sœurs Chaos, un récit loufoque, plein de fantaisie et de rebondissements. Cinq jours de tournage ont été (dé) localisés en Wallonie et c’est une équipe de 27 Wallons qui travaillera sur ce projet. La postproduction sonore sera essentiellement réalisée chez Genval-les-Dames, tandis qu’une partie des VFX sera wallonne.
SUCCÈS ANIMÉS
Lorsqu’on parle chez nous d’œuvres audiovisuelles destinées aux enfants, on pense plus volontiers à l’animation pour le petit écran, toujours omniprésente dans nos sessions. C’est encore le cas ici avec deux dossiers assez proches dans l’esprit, mais portés par des producteurs et des studios différents.
Belvision nous a ainsi présenté Les Filles de Dad, adapté du succès éditorial de Nob, créé en 2014, édité par Dupuis et déjà traduit dans une dizaine de langues. Sur 10.288 jours de travail, 3.910 seront localisés chez Dreamwall pour la réalisation des décors, la box anim, du clean posing et l’animation de 21 épisodes sur les 52 que compte la série. La durée totale de fabrication en Wallonie sera de 16 mois et occupera 17 personnes dont 4 postes-cadres. De quoi pérenniser les équipes 2D du vaisseau amiral de Marcinelle qui en compte trois à l’heure actuelle, évoluant en parallèle sur des projets divers.
Depuis quelque temps, Umedia s’intéresse de près à l’animation au grand bonheur du studio Waooh !, un de ses partenaires privilégiés qui voit ainsi son agenda s’étoffer de manière spectaculaire. Shaker Monster est une série hilarante publiée par Gallimard. Mr. Tan son auteur, alias Antoine Dole, est aussi le créateur de Mortelle Adèle et de nombreux romans pour les ados. Il a d’ailleurs remporté, avec Naissance des cœurs de pierre, le Prix Vendredi, considéré comme le Goncourt de la littérature jeunesse. 18 personnes seront occupées douze mois chez Waooh ! pour boucler près de la moitié de l’animation et des décors ce qui représente 4159 jours de travail ou 19 équivalents temps plein sur une année complète. Il est à noter que le groupe GO-N qui est à la base de ce projet a jusqu’ici optimisé ses coûts de fabrication en collaborant uniquement avec des studios asiatiques. C’est la toute première fois qu’il se tourne vers la Wallonie qui, boostée par la combinaison Tax Shelter + Wallimage, peut enfin faire face à la concurrence venue de l’Est.
MADE IN BELGIUM
On a beaucoup parlé de genre dans cet article et Queerying Nature ne fera pas exception à la règle, même s’il est ici question de genre en tant qu’identité, traité dans un documentaire qui promet d’être passionnant. Aline Magrez et Léonor Palmeira vont en effet interroger des scientifiques établis à travers le monde pour tenter de traduire cinématographiquement une réflexion éthologique et anthropologique sur une réalité « Queer » et prouver que les comportements que certains jugent subversifs ou anormaux sont inscrits dans la nature depuis toujours. La particularité essentielle de ce doc de choc présenté par Les films de la passerelle est d’intégrer une part d’animation qui sera prise en charge par une équipe wallonne afin d’illustrer de manière poétique un propos parfois très théorique.
L’ultime dossier retenu, intégralement financé en Belgique, est un projet hybride imaginé par Alec Mansion et Ben Suys. Alec fait son cinéma sera diffusé en salles, entrecoupé de séquences musicales live qui piocheront dans les standards de la variété française des années 60, 70 et 80. Original ! Le tournage durera douze jours dont onze seront localisés en Wallonie, avec 21 Wallons sur le plateau. Quelques VFX et une postproduction son entièrement effectuée chez Genval les Dames ont fini de nous convaincre. C’est le nouveau venu Jungle films qui porte ce projet et s’appuiera sur la force de frappe de Brightfish, la régie publicitaire du 7e art, pour faire de cette initiative un grand succès public à une époque où la fréquentation est en berne.
Pas de doute ! 2021 se termine sur les chapeaux de roue pour les producteurs belges. À peine serons-nous remis de nos agapes de fin d’année que la première session de 2022 nous occupera déjà. Dépôt le 20 janvier. Dès le 11, nous serons à la disposition des porteurs de projets pour dynamiser les dossiers qui viendront animer la Wallonie dans les prochains mois.