Ouvrons le feu avec Fabienne Bradfer qui écrit dans Le Soir toute l’émotion qu’elle a ressentie à la vision du film qui a inauguré le FiFF namurois: « Illégal opère comme un coup de poing. D’autant plus parce qu’il décrit une situation à quelques kilomètres de nos vies, mais il le fait sur la base d’une vraie enquête de terrain, en privilégiant le parcours humain plutôt que la charge politique. L’empathie avec le personnage de Tania est immédiate. Parce que cette jeune femme russe sans histoires, ce peut être nous dans un autre monde. On vit avec elle la peur, l’humiliation, les questions sans réponse, la méfiance, l’attente, les incertitudes et cette impuissance imposée par l’enfermement. On est dans le concret d’une dramatique réalité humaine. »
Même son de cloche sur le site de la RTBF : « Mais un autre mérite du film est d’éviter le manichéisme : on n’assiste pas à un bras de fer entre des méchants gardiens de prison et une gentille immigrée ; le cinéaste dénonce un système et des êtres humains victimes d’un système, plus que des personnes en particulier. En ce sens, « Illégal » est certes un film engagé, mais pas aveuglément militant : aucun personnage n’est là pour véhiculer un message sommaire ou caricatural… «
À ce concert de louanges, se joint aussi Fernand Denis ? Ce fin observateur de la chose filmée depuis plus de 30 ans maintenant, critique en vue de La Libre ne peut cacher son enthousiasme. À le lire , on ne s’étonnera pas qu’Anne Coesens vient de récolter à Namur, un Bayard d’Or à Namur pour l’excellence de sa prestation.
« Très concret, réaliste, « Illégal » semble se situer à l’opposé du premier film du jeune cinéaste carolo : « Cages » qui mettait en scène, de façon baroque, limite fantastique, une femme amoureuse emprisonnée dans son silence. Sur le plan du style, « Cages » et « Illégal » n’ont pas grand-chose en commun. Mais sur le fond, ils partagent le même thème de « l’enfermement » personnel et cérébral, d’un côté, et, de l’autre, universel et viscéral. Ils partagent aussi la formidable Anne Coesens. Cadenassée dans le mutisme dans « Cages », elle est, cette fois, écrouée dans une tour de Babel, deux situations qu’elle affronte avec la même rage de trouver une issue aussi improbable qu’un accord gouvernemental équilibré. À chaque fois, elle emmène le spectateur, tant elle se jette dans le rôle sans retenue, mais sans hystérie, aussi. Il y a chez cette comédienne à la fois toute la violence d’un engagement total et la retenue d’une interprétation sincère, pudique, éloignée de la performance. »
On pourrait continuer très longtemps ce tour d’horizon, mais on finirait bien vite par se répéter, car les qualités mises en exergue sont souvent identiques et le ton chaleureux, assez semblable de média en média. Épinglons néanmoins pour clôturer, la critique de Sarah Pialeprat dans Cinergie , qui va un peu plus loin dans l’analyse cinématographique. Le format et le public du média encourageant cette démarche.
« En choisissant de s’enfermer entre les quatre murs d’une prison (lieu quasi unique du film), en filmant au plus près, en restant attentif aux plus infimes détails, le cinéaste réussit à s’emparer de la moindre respiration, de la moindre émotion. Mais cette mise en scène volontairement étouffée et étouffante est contrebalancée par une dynamique qui, à chaque instant, nous prend et nous surprend par ses belles échappées. Et même si le désespoir se fait tactile, si la violence injustifiée nous empoigne, il émane d’Illégal une douceur et une pulsion de vie que la caméra parvient à traduire par la proximité et l’intimité qui lient le cinéaste à des personnages bouleversants. »
Et Sarah de terminer joliment (ce qui nous évitera de le faire nous-mêmes) : « Si Illégal est un film politique, il n’est pas pour autant un film à thèse qui voudrait imposer un discours pragmatique. Si Illégal est profondément politique, c’est parce qu’il interroge l’identité, et ce que signifie être humain. C’est par la puissance du cinéma qu’il trouve la vérité de son rapport nécessaire au politique. «